Ce weekend j’ai participé à l’édition parisienne de la Fête du Nucléaire 2022, et entre bénévoles (je me permets de m’inclure dans le lot même si j’ai été moins actif cet année), nous étions d’accord sur le fait que l’on préfèrerait que certains pro-nucléaire se taisent plutôt que mal défendre le nucléaire.
En tant que représentant de la Brigade Anti-Diesel, je considère que cela vaut pour nous aussi. Tout l’intérêt de faire partie de la BAD est d’être mieux informé que le tout venant sur les problèmes du diesel, et je déplore que des discours aussi incohérents puissent être tenus au nom de notre cause.
Mais cela soulève la question de la gouvernance (ou absence de…), et de centralisation de ressources autres que celle autour de l’actualité, et de revendications commune tenant compte de ces dernières.
Revenons sur le post. Il ne s’agira pas d’un débunk à proprement parler mais d’une confrontation avec ce que je sais des positions les plus soutenues au sein de la BAD.
Un petit retour sur la revendication de l’écologiste forcené : cette position n’a jamais (du moins pas sérieusement) été celle de la BAD. L’idée sur laquelle nous sommes toustes d’accord est de réduire drastiquement la part des véhicules légers roulant au diesel en France voire leur interdire ce carburant. La plupart des écologistes comme ce forcené ont le problème de manquer de pragmatisme avec leurs revendications de zéro diesel, zéro déchet, zéro nucléaire, 100% ENR (désolé si cette suite d’exemples laisse penser que le nucléaire serait un moindre mal, alors qu’il est plus que légitime)...
La conclusion de la démonstration est qu’on ne fabrique pas de gazole à la demande. Effectivement ce sous-produit du raffinage est un sous-produit «fatal», inévitable, et c’est tout l’enjeu de la question de son usage en France. J’insiste sur le «en France» car c’est un problème franco-français. L’ironie du sort veut que cette spécificité soit liée à notre programme nucléaire. Jusque dans les années 70, il était commun de produire de l’électricité à grande échelle à partir du pétrole. Mais le choc pétrolier a changé la donne. La France s’est doté d’un parc nucléaire pour substituer ses moyens de productions pétroliers. Ce qui sur le court terme, a engendré des surplus de productions sans débouchés. Si des ajustements sont possibles, ils sont longs et coûteux, et surtout, ce ne sont que des ajustements. Je reconnais ne pas avoir été au courant que des surplus de gazole ont autrefois été rejetés à la mer. Quand à la solution des compagnies pétrolières, l’histoire est un peu plus complexe que sous-entendue dans le post original. L’option choisie par la France a cette été de créer un marché totalement inédit, celui des véhicules légers roulant au diesel. Mais cela s’est fait avec un deal avec un audacieux groupe automobile national qui a su négocier sa part avec les autorités dans un contexte économique délicat.
La suite, vous la connaissez, ou en tout cas j’en parle sur mon blog. Le problème est que l’idée a trop bien marché, et a eu des conséquences plus que délétères ne serait-ce que du point de vue économique. Pour expliciter le déséquilbre évoqué dans l’article original, rappelons à toutes fin utiles qu’on ne peut que marginalement jouer sur les proportions de sous-produits de distillation. L’économie mondiale s’y est «naturellement» adaptée : les transports routiers sont à la fois assurés par un parc important de véhicules léger qui roulent peu (un peu plus de 10000km par véhicule par an à l’époque), et un parc réduit de véhicules professionnels roulant beaucoup. Ce qui fait qu’en général, lorsqu’un pays importe son pétrole, il a grossomodo la bonne quantité d’essence pour faire rouler ses véhicules légers et la bonne quantité de gazole à répartir entre le reste du parc routier voire autres usages (autres transports, chauffage…). Tout cela fonctionne moins bien lorsqu’avec une soixantaine de millions de tonnes de pétrole, vous devez faire rouler 22 millions de véhicules légers au gazole (en plus du reste de vos usages habituels pour le gazole).
C’est donc à cause du nucléaire qu’on se retrouve avec le problème du diesel en France, comme si la nature s’efforçait à empêcher tout pays d’être trop vertueux un pays dans sa politique énergétique. C’est aussi une des raisons pour laquelle la BAD prône la fin du gazole pour les véhicules légers. Pour retrouver un équilibre existant naturellement ailleurs dans le monde. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas réfléchir à la fin du gazole voire du pétrole, du moins dans ses usages énergétiques, mais ce n’est pas (encore ?) dans nos revendications.
J’ai donc répondu à la question du devenir du gazole qu’on ne consommerait plus dans ces cas de figure, et je suis relativement sceptique sur le choix des usagers dans ce scénario. L’automobiliste est un animal prisonnier de ses habitudes. Si l’auteur a le souvenir des panneaux publicitaires 4 par 3 faisant l’apologie du diesel, c’est que c’est à ce prix là et avec de lourdes incitations financières que l’adoption du diesel a pu se faire à large échelle. Aujourd’hui, le véhicule électrique a des avantages indéniables, mais demande de tels changement d’habitudes d’usage et de consommation que son adoption reste limitée (entre ça et le coût qui apparaît artificiellement plus élevé).
Si l’on considère que le sevrage à nos importations de pétrole n’est pas pour tout de suite, la question sanitaire ne peut plus être ignorée : aujourd’hui on en est à dénoncer la pollution particulaire des pneus et des freins (rendant tout déplacement polluant, y compris ceux réalisés à vélo), et même celle des transports en commun (la RATP en est à devoir surveiller la pollution de l’air de ses métros et RER). Les ZFE et les mesures d’interdiction de vente de véhicules diesel (voire thermiques !) montrent la voie, il ne sera plus possible de rouler au diesel (et donc d’acheter, et donc de vendre) pour un automobiliste. Les amoureuses et amoureux du gazole pourront se rassurer, ce mouvement touche aussi la navigation marchande qui va se voir interdire le fioul lourd, après de nombreuses mesure de limitation de pollution des moteurs des navires et de leur carburant. Ces derniers passeront donc au fioul léger (autre nom du gazole, non ce n’est pas qu’un sobriquet envers les diésélistes). Donc tel que je je le vois, la question se déplace sur le devenir du fioul lourd, et non sur celui du gazole.
Et pour finir. Non, les filtres a particules sont loin d’avoir mis fin à la pollution des moteurs diesel, ils ne font que déplacer (littéralement !!!) le problème (ajoutons que c’est aussi commode d’ignorer les autres polluants, comme les oxydes d’azote, profitant du fait qu’ils soient moins connus).
Quelques sources pour aller plus loin (oui, j’ai osé mettre une vidéo YouTube parmi mes sources !) :
http://bloganti-diesel.blogspot.com/2010/07/chartre-de-la-bad.html
https://jancovici.com/transition-energetique/petrole/a-quoi-nous-sert-ce-fameux-petrole/
https://www.insee.fr/fr/statistiques/4277882?sommaire=4318291
https://www.youtube.com/watch?v=SdlQnhevzNg
Article original :
https://www.facebook.com/Votezpourunlensois/posts/pfbid02EAJV1XDCbd8Cua6Mvh3KdTLHL6JMLSpeFTEnbrPQY2UnGFBWUKZLmLLQK9LyZU7Yl